Suite à ses nombreuses visites d’entreprises, Coralie Dénoues, présidente du Conseil départemental des Deux-Sèvres, a, par courrier envoyé la semaine dernière, alerté Bruno Lemaire sur les difficultés rencontrées par les entreprises. L’élue interpelle le ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique de la France, sur la fragilité des entreprises étranglées par l’inflation. Voici son courrier.

« En tant que présidente du Conseil départemental, je ne peux me résoudre à assister à la mise à l’arrêt de l’activité de ces TPE et PME prises à la gorge par la flambée des coûts de l’énergie, de la masse salariale, des mises aux normes, et affaiblies par la pénurie de main-d’œuvre… Il en va de l’avenir de notre économie, de nos savoir-faire, de la vitalité de nos territoires et de tout ce qui constitue la possibilité de vivre ensemble et de faire société.

Monsieur le Ministre, parce que je suis la présidente d’un département où, comme ailleurs dans l’Hexagone, les entreprises sont étranglées par l’inflation et nombre habitants peinent à joindre les deux bouts face à l’envolée des prix des biens alimentaires et de consommation courante ; parce que je suis impliquée dans la sauvegarde de la vie économique et sociale de mon territoire autant que vous l’êtes dans la grandeur et le rayonnement de la France, je tiens par ce courrier à vous alerter afin que l’avenir des Deux-Sèvres s’éclaircisse comme celui de l’ensemble des départements de France qui partagent tous ce même constat.

« Je suis comme l’ensemble des élus locaux, en première ligne. »

Coralie Dénoues, présidente du Département des deux-Sèvres

Chef d’entreprise et femme politique engagée pour la vitalité de son département et de ses habitants qui y construisent leur vie, je suis comme l’ensemble des élus locaux, en première ligne. La loi Notre nous ayant dépourvu de toute possibilité de soutenir nos entreprises, je suis censée me résigner à attendre les bras croisés que les salariés de ces entreprises viennent frapper aux portes de nos guichets sociaux dans l’espoir de toucher quelques subsides. Je n’ai pas été élue pour cela. C’est pourquoi j’emploie mon temps à rencontrer les chefs d’entreprise et à essayer de mobiliser les acteurs susceptibles d’intervenir concrètement.

La visite de l’entreprise Loeul & Piriot le 10 novembre dernier, m’a définitivement convaincue de m’adresser à vous ce jour. Basé à Thouars dans le nord des Deux-Sèvres, ce leader historique et spécialiste dans la transformation et la commercialisation de viande de lapin et de chevreau depuis 1906 emploie 450 salariés sur deux sites. Elle s’approvisionne auprès de quelque 450 éleveurs présents dans les trois plus grandes régions d’élevage de lapins (Bretagne, Pays de la Loire et Nouvelle Aquitaine). Elle fait vivre de nombreux foyers et constitue un maillon essentiel d’une filière agricole de l’amont à l’aval.

Un tableau morose

Lors de cette visite et des nombreux échanges avec les entrepreneurs, cette entreprise m’est apparu prise en étau entre une facture de gaz qui sera multipliée par 5 dès 2024, des augmentations respectives de 15 % fin 2022 et de 350 % en 2023 pour les postes gas-oil et électricité. Sans oublier une mise aux normes des emballages dictée par la loi Climat et Résilience chiffrée à 680 000 euros et un poids croissant de la masse salariale en raison de l’augmentation du SMIC. Autant de surcoûts pour cette entreprise également malmenée par la raréfaction de la main-d’œuvre et un vieillissement de ses éleveurs partenaires.

C’est là un tableau morose que je vous peins dans cette France où, selon la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, 150 000 entreprises sont menacées car, en proie à tous ces chocs exogènes et tout juste sorties d’un orage pandémique. L’exemple de cette entreprise n’en n’est malheureusement qu’un parmi beaucoup d’autres.

« Procéder dans les meilleurs délais au versement des aides annoncées. »

Coralie Dénoues

Monsieur le Ministre, je me permets de vous alerter sur la situation fragile de nos entreprises qu’elles que soient leur taille, leur activité, leur implantation. Une ligne de production à l’arrêt même temporairement est une fissure dans le quotidien de nos administrés et leur écosystème.

Monsieur le Ministre, avant qu’il ne soit trop tard et qu’il nous faille panser des plaies sociales et politiques encore plus graves, j’attire votre attention sur la nécessité de procéder dans les meilleurs délais au versement des aides annoncées visant à amortir la facture énergétique de ces entreprises qui font la France des territoires.

Certaine que vous saurez prêter toute l’attention nécessaire à cette cause qui est la mienne et à n’en pas douter la vôtre, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique de la France, l’assurance de ma meilleure considération. »